A R B R E de N O Ë L
Les premiers arbres de Noël apparaissent en Alsace au XVe siècle. La région n’est pas française à cette époque : elle fait encore partie du Saint Empire romain germanique.
Cette nouvelle coutume est d’abord nommée « Mai d’hiver », car c’est en réalité la récupération par l’Eglise chrétienne d’un rite païen de fécondité, celui de l’Arbre de mai que l’on plantait au printemps.
La plupart des fêtes chrétiennes (Noël, la Chandeleur, la Toussaint, la Saint-Valentin… pour n’en citer que quelques-unes) sont d’ailleurs d’anciennes fêtes païennes.
La tradition de l’Arbre de mai a évolué : alors que c’était un arbre vivant à l’origine, depuis le XVIe siècle, c’est un mât (tronc d’arbre dépourvu de branches) qui est planté dans la terre, le Maibaum>, tel qu’il est encore connu dans l’espace germanique aujourd’hui.
Aux XVI-XVIIe siècles, l’arbre de Noël est rarement un sapin, d’une part, il s’agit souvent d’autres végétaux à feuilles persistantes (comme l’olivier, le buis, le houx, le laurier… dont le feuillage reste vert en hiver), d’autre part, ce sont plutôt des branches ou des rameaux que des arbres entiers.
La tradition de l’arbre de Noël se développe chez les protestants allemands pour se démarquer des catholiques qui, eux, privilégiaient la tradition de la crèche avec ses santons.
Et, en effet, ce sont des princes et princesses de culture germanophone et protestante qui vont l’introduire progressivement dans les cours d’Europe occidentale :
– 1er essai à Versailles avec la Princesse palatine, Elisabeth-Charlotte, belle-sœur de Louis XIV,
– Nouvelle tentative en 1738, avec Marie Leszcynska, femme de Louis XV, d’origine polonaise.
Mais, apparemment, ces deux premières « importations » ne sont pas couronnées de succès , puisque, en 1837, la cour semble redécouvrir la tradition de l’arbre de Noël avec la duchesse d’Orléans, née Hélène de Mecklembourg.
– A Vienne, c’est la princesse Henriette de Nassau-Weilburg (une calviniste), épouse de l’archiduc Charles d’Autriche (frère de l’empereur François 1er), qui fait découvrir l’arbre de Noël à la cour en 1816,
– En Angleterre, c’est le prince Albert, époux de la reine Victoria, qui introduit (en 1841) cette tradition provenant de sa Saxe natale .
Mais après la guerre franco-prussienne de 1870 et l’annexion de l’Alsace-Moselle, ce sont les « optants » (= les habitants de ces départements, qui ont choisi de rester français et qui sont obligés de quitter leur patrie devenue allemande) qui vont diffuser cette coutume dans l’Est de la France.
Avec le temps, les pommes rouges qui ornaient l’arbre sont remplacées par des boules de verre (puis de plastique…), les guirlandes électriques se substituent aux bougies de cire (au grand soulagement des pompiers…), les papillotes et autres friandises prennent la place des fleurs, noix peintes et décorations en paille.
Les régions du Midi ont résisté plus longtemps à l’invasion du sapin de Noël : en Provence, jusqu’à la fin des années 1960, on fêtait Noël sans arbre et sans Père Noël. C’était l’Enfant Jésus qui descendait par la cheminée pour déposer des cadeaux dans les souliers disposés devant, dans un ordre dépendant de l’âge de leur propriétaire : des chaussons du petit dernier de la famille jusqu’aux chaussures du grand-père.
Et puis le Sapin est arrivé, suivi un peu plus tard de la Couronne de l’Avent. Rien ne résiste à la mondialisation des traditions !
SAPIN de NOËL à l’envers !
Un monde qui marche sur la tête ?
Ce sont les grands magasins qui ont lancé cette nouvelle mode – pour des raisons de marketing, bien entendu : cela permet d’accrocher les décorations et les autres articles à vendre à la hauteur des yeux des clients et de dégager suffisamment de place au sol pour y présenter d’autres produits.
Ces dernières années, ce sont les particuliers qui ont adopté le « sapin à l’envers » : l’arbre est ainsi moins encombrant et hors de portée des jeunes enfants et des animaux domestiques. En outre, comme c’est un sapin artificiel (en effet, un « vrai » arbre serait trop lourd et exigerait une fixation plus robuste), il ne perd pas ses aiguilles et il est économique, car il peut être réutilisé chaque année (jusqu’à ce que la mode passe …)
Beaucoup estiment que le sapin à l’envers bafoue la tradition. Certains y voient même un sacrilège et rappellent le rite satanique de la croix à l’envers. D’autres se demandent avec inquiétude jusqu’où ça va aller : verra-t-on bientôt le Père Noël pendu par les pieds ? Et pourquoi pas les rennes ? Et, qu’en est-il des bougies ? Heureusement qu’en France on décore surtout le sapin de Noël avec des guirlandes électriques ! Mais en Autriche ?
L’exemple à ne pas imiter ! La municipalité de Graz a voulu suivre cette mode, mais n’a pas compris qu’il fallait pendre le sapin par le pied et pas par le sommet . Résultat : les arbres de Noël qui pendouillent tristement dans la capitale styrienne ont un aspect sinistre – pour ne pas dire macabre – pendant la journée, quand ils ne sont pas illuminés .
Au fait, le sapin à l’envers n’est pas une invention du XXIe siècle : c’est une tradition qui existe depuis des siècles dans l’Est de l’Europe. En Autriche aussi, certains se souviennent que dans leur enfance – surtout en milieu rural – l’arbre de Noël était suspendu au plafond : d’une part pour échapper aux animaux qui vivaient dans la ferme et d’autre part pour ne pas encombrer la salle commune (à une époque où elle servait de lieu de rassemblement pour toute la famille).